À vos stylos !

L'exercice qui précède vous a permis de découvrir différentes marques et différents types de phrases permettant de faire entendre plus que ce que l'on dit.

Pour bien vous approprier ces différents ressorts de l'implicite, essayez de répondre aux questions suivantes, portant sur les énoncés dont il a été question dans le corrigé de l'exercice précédent.

Lisez les questions,

prenez un stylo, ou simplement réfléchissez un moment,

regardez éventuellement les indices,

puis, une fois que vous avez une idée de la réponse, lisez le corrigé et comparez.

Si vous peinez à trouver, relisez le corrigé de l'exercice qui précède : tout y est ; il faut juste que vous repreniez ce qui a été expliqué.

Et ne vous inquiétez pas, tout sera repris de façon synthétique dans la fiche mémo qui suit. Il s'agit seulement ici de vous aider à vous approprier progressivement ces notions.

Question

Que fait entendre une exclamation ?

Indice

Pensez à « Elle arrive ! » par exemple.

Indice

Est-ce qu'on peut s'exclamer sur « On est en 2023 » ? Dans quelles conditions pourrait-on s'exclamer sur cela ?

Indice

Dans quel cas peut-on s'exclamer en disant « Je mange » ?

Solution

L'exclamation suppose d'abord la surprise, sauf quand il s'agit d'un rappel face à un interlocuteur qui ne voulait pas entendre. Dès lors il serait difficile de s'exclamer sur le fait qu'on est en 2023, sauf si on avait oublié les dates, si on a voyagé dans le temps, ou si la personne à qui on s'adresse semble ne pas tenir compte de la date.

L'exclamation est par ailleurs toujours attachée à l'expression de sentiments de la personne qui s'exclame : plaisir, inquiétude, ou au moins énervement face à autrui qui ne tient pas compte de ce qui est formulé.

Le fait de manger n'ayant en soi rien d'inquiétant, et n'étant une source de plaisir que si l'on n'a pas mangé depuis longtemps, on s'exclamera difficilement sur le fait de manger, à moins de faire entendre justement qu'on a beaucoup espéré ce repas qui nous comble, ou de faire entendre son énervement face à d'aucuns qui chercheraient à me déranger alors que je mange.

Question

Et une injonction alors ? Toujours avec un point d'exclamation, mais marquant cette fois que quelque chose est envisagé voire visé.

Indice

Pensez à un ordre simple, comme « Pars ! » à l'impératif. Qu'est-ce que cet ordre laisse entendre ? Quelles sont les conditions pour que l'on puisse formuler un tel ordre ?

Indice

Et maintenant pensez à ce que vous laissez entendre quand vous demandez « Une bière s'il-vous-plaît ! »

Indice

Et en disant « Il doit répondre ! »  ?

Indice

Ou même avec une simple intonation injonctive dans laquelle l'ordre s'entend bien clairement : « Il part maintenant ! »

Indice

Et qu'est-ce qui se passe si on vous demande de partir et que vous êtes en fait déjà parti.e, ou si vous n'êtes tout simplement pas dans l'endroit dont on vous demande de partir ?

Solution

L'injonction peut prendre différentes formes :

  • une phrase à l'impératif (« Entrez ! »)

  • parfois une phrase à l'infinitif (« Entrer sans frapper »)

  • un verbe comme devoir ou pouvoir (« Elle doit sortir ! » ; « Elle peut sortir ! »)

  • une simple phrase affirmative, dès lors que l'intonation est injonctive (« Il s'en va maintenant ! »).

  • un simple groupe nominal (« Ma bière ! » ; « Silence ! ») souvent avec un déterminant marquant une quantité (« Une bière ! » ; « Un peu de silence ! » ; « Assez de mépris ! »).

On appelle injonctions des ordres, des demandes, des mises en garde, de simples suggestions ou des conseils : tout ce qui vise à ce que quelque chose se réalise.

Les injonctions font nécessairement entendre que ce qui est demandé ou proposé n'est pour l'instant pas réalisé.

S'il s'avère que c'est déjà réalisé, l'injonction parait pour le moins déplacée : elle semble vouloir faire croire quelque chose qui est faux.

Question

Que font entendre des points de suspension en fin de phrase lorsqu'il ne s'agit pas de marquer qu'une énumération est incomplète ?

Indice

Pensez par exemple à « Elle n'a pas répondu... »

Indice

Je veux dire quoi avec mes points de suspension quand je dis « Elle n'a pas répondu... »

Indice

Et si je dis « Dupont est candidat ... », pourquoi des points de suspension ?

Indice

Beaucoup de choses en fait. Pourquoi est-ce qu'il n'y a même pas besoin de les dire ?

Solution

En fin de phrase, les points de suspension laissent entendre que le destinataire saura comprendre de lui-même ce que le locuteur veut dire. Il s'agit plutôt d'indiquer quelque chose de négatif, quelque chose qui ne nous ravit pas, catastrophe ou léger problème, mais en tous les cas quelque chose que l'on présente comme allant sans dire.

C'est la raison pour laquelle cet usage des points de suspension est à éviter : il n'est pas bon de faire comme si ce que l'on avait à dire était à ce point évident ; il n'est pas bon de supposer a priori que l'autre est suffisamment en accord avec vous, ou que vous avez suffisamment raison pour ne même pas avoir besoin de formuler explicitement votre position, surtout s'il s'agit de faire entendre des choses négatives.

Question

Et un conditionnel, que fait-il entendre ?

Indice

Pensez à « On écrirait ».

Indice

Pensez aux jeux d'enfants : « Je serais le voleur, tu serais le gendarme. »

Indice

Et dans « Cela me ferait plaisir » par exemple, à quoi renvoie cela ?

Indice

Ou encore avec un verbe de souhait, « Je voudrais y arriver » ? Les verbes de souhait ou d'appréciation comme vouloir, souhaiter, aimer sont souvent mis au conditionnel. Avec quel effet ?

Solution

Un énoncé au conditionnel peut avoir des valeurs variées mais il indique toujours, de manière implicite, que ce qui est envisagé dépend de conditions qui ne sont pas les conditions actuelles.

Ce peuvent être des conditions fictives, que le conditionnel permet alors d'imaginer.

Ce peuvent être des conditions envisagées dans le contexte antérieur (ce à quoi renvoie le pronom cela dans cela me ferait plaisir : le plaisir évoqué est conditionné par les conditions auxquelles ce pronom fait référence).

Le conditionnel est volontiers associé à des verbes marquant le souhait ou l'appréciation, positive ou négative (Je détesterais qu'il vienne) pour marquer que ce souhait ou cette appréciation dépend de conditions qui sont extérieures à la personne qui souhaite ou apprécie ("cela ne dépend pas de moi").

On le trouve au demeurant aussi associé à des verbes comme pouvoir ou devoir, marquant là encore que l'éventualité envisagée (qu'il vienne) dépend de conditions extérieures à celui qui s'exprime : « il pourrait venir » fait entendre que cette possibilité est soumise à conditions ; « il devrait venir » peut avoir différentes interprétations, l'une étant de faire entendre de manière implicite les conséquences positives d'une telle venue ("ce serait une bonne chose"), l'autre étant de relativiser la préconisation exprimée ("cela dépend de beaucoup de choses, ce n'est pas acquis").

Question

Qu'en est-il maintenant quand on exprime directement une règle générale ?

Indice

Pensez à une phrase comme « Un voyage se prépare longtemps à l'avance ». Si quelqu'un vous dit cela alors que vous envisagez de partir en voyages, ou que vous êtes en voyage, que vous dit-il qui vous concerne personnellement ?

Indice

Et revenez au slogan « Piles et batteries, ça rime avec tri ». Est-ce que ce slogan se contentait d'énoncer une proposition générale ?

Solution

Un énoncé général peut être une façon implicite d'énoncer une injonction. C'est le cas en particulier lorsqu'il comporte un verbe d'action (préparer, rimer dans le sens qu'il prend dans le slogan quand il veut dire "s'associer") : il s'agit d'appliquer l'injonction à la situation particulière des personnes auxquelles l'énoncé s'adresse.

Question

Et qu'en est-il des cas où deux propositions sont reliées par un connecteur marquant l'opposition ?

Indice

Comment interprétez-vous « Bien qu'il soit riche, il n'est pas méchant » ? Pourquoi cette opposition ?

Indice

Il faut que l'auteur ait considéré que normalement les riches sont méchants.

Solution

Lorsque deux propositions sont reliées par un connecteur marquant une opposition, le connecteur laisse entendre de manière implicite une loi générale selon laquelle l'une de ces propositions devrait normalement entraîner que le contraire de l'autre se réalise.

Voilà, on a revu les principaux points à retenir concernant toutes ces formes qui sont susceptibles d'induire de l'implicite dans le discours. Elles sont d'ordre et de nature variées : signes de ponctuation (associés plus fondamentalement à des types de phrases), marques de temps ou modes, connecteurs.

Dans la fiche mémo qui suit, tout cela est récapitulé :

- d'abord les types de phrases et les signes de ponctuation associés

- ensuite les marques de temps et modes qui peuvent véhiculer des implicites plus ou moins importants

- enfin un mot sur un type de connecteurs, les connecteurs d'opposition, aux effets particulièrement importants en termes de sous-entendus.