3. Les formes de la discrimination

Selon la typologie classique de Arthur Pigou (1920)  Il existe trois grandes formes de discrimination par les prix.

La discrimination au premier degré, ou discrimination parfaite consiste à faire payer à chaque consommateur le prix maximal qu’il est prêt à payer pour acquérir chaque unité de bien.  Plus les firmes sont capables de proposer des niveaux de prix différenciés aux différents consommateurs, plus elles sont en capacité de s’approprier une part importante du surplus des consommateurs.

Prenons l’exemple d’un monopole, disposant du pouvoir de marché nécessaire à la mise en place d’une discrimination parfaite. Dans le cas où il est en capacité de proposer un prix différent pour chaque unité de bien, il est facile de vérifier qu’il capera la totalité du surplus des consommateurs.

Trois situations sont comparées à la figure 7. Dans le cas a, le monopole pratique un prix unique et possède donc une recette marginale distincte de la demande au marché. Il maximise son profit en produisant la quantité QM au prix PM. Si le monopole propose trois niveaux de prix différents (cas b), son profit progresse nécessairement au détriment du surplus des consommateurs.

Dans le cas d’une discrimination parfaite (cas c) le monopole s’approprie la totalité du surplus des consommateurs sous la forme de profit. Notons toutefois que dans cette situation le monopole maximise le surplus social (tout en le captant intégralement à son profit !), puisque la quantité totale produite correspond  à celle qui serait produit en concurrence, à l’intersection de la demande et du coût marginal.

Figure  7. Le monopole en situation de discrimination au premier degré

La discrimination au deuxième degré consiste à proposer les mêmes pratiques tarifaires à tous les consommateurs, mais en proposant des formules de tarification différentes suivant la quantité achetée.

Il peut s’agir :

-          De ristournes ou de formules de prix dégressif suivant la quantité achetée

-          De formules d’abonnement

-          De tarifs combinant une partie fixe et une partie variable fonction de la quantité achetée

L’intérêt de ces pratiques, très répandues, est de permettre aux firmes de capter une partie du surplus des consommateurs sans besoin d’identifier au préalable les préférences des différents consommateurs. La discrimination au premier degré suppose en effet de savoir à quels consommateurs imposer le bon niveau de prix, c’est-à-dire de collecter un ensemble d’informations très coûteuses sur les préférences individuelles.

L’utilisation de formules de tarification au second degré conduit au contraire les consommateurs à s’auto-sélectionner en choisissant la formule de tarification qui correspond à leurs préférences.

La discrimination du troisième degré consiste à segmenter la clientèle en sous-marchés, en pratiquant des prix différenciés en fonction de ces sous-marchés. Cette segmentation suppose donc que la condition de non arbitrage est vérifiée entre les différents segments, mais pas au sein de chaque segment. Le prix pourra donc être différent pour chaque groupe de clients sans risque de transactions secondaires intergroupes, mais doit rester unique au sein de chaque groupe.

La segmentation ne présente un intérêt pour les firmes que dans la mesure où chaque segment présente une élasticité-prix de la demande différenciée par rapport aux autres segments. Lorsque cette condition est remplie, la règle de tarification différenciée  permettant de maximiser le profit des vendeurs est simple : elle consiste à augmenter le prix de vente sur les segments inélastiques et à  baisser le prix sur les segments élastiques. En effet, à volume de production et donc à coût total identiques, l’augmentation du prix sur un segment inélastique entraine un effet prix positif (chaque unité est vendue plus cher)  dominant l’effet quantité négatif (la quantité vendue sur ce segment diminue).  

Nous examinons dans le paragraphe suivant le cas d’un monopole pratiquant une discrimination au troisième degré.