5.3 : Redistribution, consommation, investissement et croissance

2. Egalité entre épargne et investissement

Le premier des points intermédiaires nécessaires à notre démonstration est l’égalité entre l’investissement et l’épargne.

Pour démontrer cette égalité, nous allons considérer une économie fermée (sans importations ni exportations). Considérer une économie ouverte ne changerait pas fondamentalement la donne, mais complexifierait énormément la discussion.


Dans ce cadre, on peut faire trois observations :

(1)     Le PIB est la somme des revenus (le PIB comme somme des revenus est souvent noté \(Y\)).
(2)     Les revenus sont soit utilisés pour des dépenses de consommations, soit épargnés : \( Y = C + S \)
Remarque : l'épargne est notée \(S \) pour "savings."
(3)     Le PIB est la somme des dépenses de consommation finales et de la formation brute de capital. La formation brute de capital correspond à ce que l’on appelle l’investissement dans le langage « ordinaire » : \( Y = C + I \)

Le point numéro 1 et le point numéro 3 sont des simples conséquences de la définition du PIB. Pour le point 3, nous avons utilisé l'approche par la demande du PIB en considérant une économie fermée. Aussi, le commerce extérieur (X-M) disparait. Il ne reste que la consommation et la formation brute de capital. Cette dernière, quand les stocks et l'acquisition d'objets de valeur ne sont pas trop importants correspond à la formation brute de capital fixe ou plus simplement, à l'investissement. Le point numéro 2 découle d’une simple constatation. Si on donne 1€ à quelqu’un, cet individu peut soit dépenser cet euro, soit le garder pour plus tard et donc, l’épargner. [Une remarque: les économistes définissent l'épargne comme un revenu non consommés. Si vous "perdez" une pièce d'un euro, un économiste considèrera que vous l'avez utilisée.]

Par ailleurs, la réunion de ces deux équations précédentes donne immédiatement \( S = I \)

Cette égalité est une égalité comptable. Elle est toujours vérifiée (on dit parfois qu’elle est toujours vérifiée ex-post) ; toutefois, ces manipulations d’équations ne rendent pas forcément apparent les mécanismes économiques qui la sous-tendent.

Deux visions s’affrontent d’ailleurs sur les mécanismes à l’œuvre derrière cette égalité. Pour simplifier, nous qualifierons ces visions de classique (ou libérale) et de keynésienne :

  • La vision classique : C’est l’épargne qui « génère » les investissements. Une épargne plus abondante signifie plus de capitaux prêtables aux acteurs ayant besoin de fonds. Le coût lié à l’acquisition de ces capitaux va alors diminuer, ce qui va pousser des entreprises à emprunter (utiliser ces capitaux) afin de réaliser des investissements.

    Remarque: Cette logique correspond à un choc d’offre sur le marché des fonds prêtables sur lequel les offreurs sont les ménages en capacité de financement (ceux disposant d’une épargne) et les demandeurs sont les entreprises cherchant à obtenir des capitaux afin d’investir. Sur ce marché, le « prix » est le taux d’intérêt et il s’ajuste afin d’équilibrer le marché.

 

  • La vision keynésienne : Chez Keynes, c’est au contraire l’investissement qui créé l’épargne. Lorsque les entreprises investissent, elles stimulent l’activité économique. Cela génère de nouveaux revenus dans cette économie dont une partie sera alors épargnée. Cette nouvelle épargne va être rigoureusement égale au montant de l’investissement (pour des raisons techniques que nous n’aborderons pas).