2. Phonétique

L'objet de la phonétique est la description des sons du langage. Cette description peut être de nature articulatoire ou acoustique. Une description articulatoire s'appuie sur les organes phonatoires mis en œuvre dans la production des sons et sur leur mode de production. Une description acoustique s'appuie quant à elle sur les propriétés physiques des sons indépendamment de leur mode de réalisation. Dans ce qui suit, la description des sons du langage sera uniquement de nature articulatoire.

Comme le montre le schéma 1, les sons sont le résultat d'une vibration de l'air au contact d'un corps quelconque qui représente une entrave au passage de l'air.

Schéma du passage de l'air à travers un obstacle, ce qui produit des ondes sonores
air obstacleonde sonore

Selon leurs propriétés acoustiques, les sons se répartissent en deux groupes ; les sons mélodiques et les bruits. Les sons mélodiques (ceux produits notamment par les instruments de musique) mettent en jeu une vibration périodique tandis que les bruits sont apériodiques.

oscillogramme d'un son mélodique (périodique)
son mélodique (périodique)
Oscillogramme d'un bruit (apériodique)
bruit (apériodique)

Cette distinction vaut également pour les sons du langage. Par définition, les voyelles sont des sons mélodiques, tandis que les consonnes se présentent globalement comme des bruits de transition. Cette différence nous est déjà donnée par l'étymologie : le mot "voyelle" évoque la voix produite par la vibration des cordes vocales alors que le mot "consonne" signifie littéralement qui sonne avec. Mais contrairement aux voyelles qui sont donc par nature voisées, les consonnes ne peuvent pas être définies uniquement par la présence d'un bruit ; certaines sont voisées et d'autres non-voisées (on parle alors de consonnes voisées ou sonores et de consonnes non-voisées ou sourdes). La seule différence entre les consonnes [p] et [b] est la présence ou l'absence de voisement : [p] est une consonne sourde tandis que [b] est une consonne sonore.

Étant donné que la distinction entre sons mélodiques et bruits ne permet pas de différencier fondamentalement les voyelles des consonnes, on peut se demander néanmoins s'il existe une quelconque propriété qui puisse les opposer ; une propriété qu'auraient les voyelles et que n'auraient pas les consonnes, ou inversement, une propriété qu'auraient les consonnes mais pas les voyelles. Les différentes propriétés qui distinguent les voyelles des consonnes sont les suivantes :

  1. présence ou absence de voisement,

  2. possibilité ou impossibilité de prononcer le son isolément,

  3. présence ou absence d'entrave au passage de l'air.

En ce qui concerne le premier critère, on vient de voir qu'il ne suffisait pas à distinguer radicalement les deux sortes de sons. Le second critère est du même ordre ; toutes les voyelles peuvent être articulées isolément, tandis que les consonnes se divisent en deux groupes : celles dont l'articulation fait appel à une voyelle de support pour pouvoir être prononcées et celles qui peuvent être articulées sans voyelle d'accompagnement. Les premières sont appelées consonnes momentanées tandis que les secondes sont appelées consonnes continues. La consonne [p], par exemple, ne peut pas être prononcée sans voyelle de support – en l'occurrence il s'agit pour le français d'un [e] ("p" = [pe]), tandis que la consonne [s] peut être articulée sans voyelle de support. Notons que notre lecture de l'alphabet ne reflète pas cette propriété différentielle puisque toutes les consonnes sont prononcées avec une voyelle de support, la consonne [s] étant prononcée en l'occurrence avec un [ɛ] initial : [ɛs]. Le troisième critère est approprié pour la distinction entre consonnes et voyelles, mais présente l'inconvénient de ne pas être binaire. On ne peut donc pas opposer simplement les voyelles et les consonnes par la présence ou l'absence d'entrave au passage de l'air, car il existe en fait une gradation ; le passage de l'air est plus étroit pour l'articulation du [i] que pour celle du [a]. De même pour les consonnes, il y a différents degrés d'obstruction pour les consonnes (ce point est développé plus loin). En raison de cette gradation, il est impossible de séparer de façon non arbitraire les consonnes et les voyelles en se fondant uniquement sur des propriétés phonétiques. Il convient donc d'envisager la différence entre les consonnes et les voyelles comme un continuum :

Dégradé du noir au blanc représentant un continuum
consonnes
voyelles

Du fait du continuum sonore, il existe une classe particulière de sons à mi-chemin entre les consonnes et les voyelles. On appelle ces sons, selon le cas, semi-consonnes ou semi- voyelles ou encore approximantes. Ces trois termes sont utilisés pour désigner les mêmes sons :

Dégradé du noir au blanc représentant un continuum
consonnes
approximantes
semi-consonnes
semi-voyelles
voyelles