1. La représentation standard d'un marché et la règle du "côté court"

L'approche standard de la représentation des marchés en économie, qui est celle des économistes dits "néoclassiques", appuie l'essentiel de ses raisonnements sur une représentation graphique de ce qu’est un marché. Il s’agit d’une représentation stylisée et abstraite qui simplifie le réel afin d'en réduire la complexité pour se concentrer sur les éléments essentiels permettant de faire apparaître les mécanismes simples et basiques de fonctionnement du marché. Concrètement, la représentation standard du marché d'un produit quelconque synthétise les comportements de l'ensemble des demandeurs (consommateurs) grâce à une droite de demande globale du produit et elle synthétise les comportements de l'ensemble des offreurs (producteurs) grâce à une droite d'offre globale du produit. Ces deux droites représentées simultanément sur un même graphique symbolisant la rencontre des offreurs et des demandeurs relient des quantités offertes ou demandées à différents niveaux de prix. Par convention, les quantités sont représentées en abscisses et les prix le sont en ordonnées.


Nous voyons immédiatement qu'un point particulier se dégage : le point d'intersection entre les droites d'offre et de demande. Ce point constitue dans l'approche standard la « meilleure situation possible » pour le marché : c’est le point où l’offre est égale à la demande et pour lequel le maximum d'échanges se réalisent. En effet, si le prix du produit s'établit à une autre valeur que celle correspondant à l'intersection des deux fonctions (au-dessus ou en dessous du prix considéré), on obtient les deux situations suivantes :

Si le prix p1 est supérieur à p*, le prix correspondant à l'intersection des fonctions d'offre et de demande, alors la quantité demandée est égale à QD1 (faible demande car prix élevé) et la quantité offerte est égale à QO1 (quantité offerte élevée car prix élevé) . On constate ainsi que les quantités offertes du produit sont supérieures aux quantités demandées. En termes d’échanges réalisés, cela veut dire que la demande va contraindre l’offre : c’est ce qu'on appelle le « côté court » du marché qui s’impose. On ne peut en effet pas obliger les consommateurs à acheter plus du produit qu'ils ne le souhaitent à ce prix élevé. Les échanges réalisés correspondront donc à ce prix à une quantité QD1 qui est, comme on le voit sur le graphique, une quantité inférieure à celle qui s'échangerait au prix d'équilibre p*.

Si le prix p2 est inférieur à p*, alors la quantité demandée est égale à QD2 (forte demande car le prix est faible) et la quantité offerte est égale à QO2 (quantité offerte faible car le prix est faible). On constate alors que les quantités demandées du produit sont supérieures aux quantités offertes. En termes d’échanges réalisés, cela veut dire cette fois que l'offre va contraindre la demande. On se situe de nouveau du « côté court » du marché puisqu'on ne peut pas obliger les offreurs à vendre plus du produit qu'ils ne le souhaitent à un prix si faible. Les échanges réalisés correspondront donc à ce prix à une quantité QO2 qui est, comme on le voit sur le graphique, une quantité inférieure à celle qui s'échangerait au prix d'équilibre p*.

Ainsi, si le prix s'établit à une valeur différente de celle correspondant à l'intersection des fonctions d'offre et de demande, les quantités échangées seront systématiquement inférieures à celles qui seraient échangées au prix d'équilibre. Le prix d'équilibre du marché d'un produit est donc celui qui permet de maximiser le volume des échanges et donc de satisfaire simultanément le plus grand nombre d'offreurs et de demandeurs. On considère dans l'approche standard qu'il est pour cette raison souhaitable d'atteindre systématiquement cet équilibre.