Fiche mémo : Ce que dit un mot
Fondamental : Mini-scénario
Le contenu de nombreux mots mobilise une série d'éléments que le mot à la fois convoque et caractérise. Ces éléments forment ensemble un mini-scénario qui se déploie nécessairement lorsque ce mot est utilisé, et qui va participer à l'interprétation générale du discours dans lequel ce mot a été utilisé.
Exemple :
Par exemple, le mot cher convoque et met en scène d'abord un objet ou service qui sont l'objet ou le service donnés comme chers ; ensuite des pourvoyeurs et des bénéficiaires parce qu'il est nécessairement question de transaction ; puis un coût parce que seuls les objets ou services dotés d'un coût peuvent être tenus pour chers ; enfin un point de comparaison, qui peut être le coût que l'on aurait attendu pour cet objet ou ce service, ou la somme que l'on serait prêt à dépenser.
Fondamental : Scripts
Les mots mobilisent aussi un ensemble de scripts qui sont des types de contextes privilégiés, ne faisant pas partie du sens propre des mots, mais que ces mots convoquent, et qui vont servir à interpréter les discours dans lesquels ils interviennent.
Ces scripts sont associés aux mots :
- d'une part parce que les mots en question sont fréquemment utilisés dans des contextes où le script est déployé,
- d'autre part parce qu'il y a effectivement une relation réelle quoique non nécessaire entre ce que désigne le mot et les scripts qu'il convoque.
Exemple :
Par exemple, le mot cher déploie deux types de scripts, un script de richesse et de luxe, un script de difficulté financière.
Cela veut dire que lorsque le mot sera employé, il mobilisera de manière implicite l'un ou l'autre de ces scripts, qui ne lui sont pas associés de manière nécessaire (des objets non luxueux peuvent bien entendu être chers, les possesseurs d'objets chers peuvent ne pas être riches, et ne pas avoir de difficultés financières), mais qui vont fournir des grilles de lecture pour le discours où le mot a été employé.
Remarque :
Bien évidemment, le script déployé par un mot dépend aussi du contexte dans lequel le mot est utilisé : ainsi si l'on parle d'un ami "cher", le mot change complètement de contenu.
De même dans "J'ai bien bu à la soirée d'hier", le mot soirée s'interprète comme référant à une fête, mobilisant donc une assemblée de personnes que le même mot soirée ne mobilise pas quand on parle de faire quelque chose "dans la soirée" ; de même les boissons bues sont interprétées comme des boissons alcoolisées parce qu'elles s'inscrivent dans le script de la fête.
Conseil :
Par conséquent les différents mots d'un texte contribuent ensemble à reconstituer le script dans lequel le texte s'inscrit. Ils vont de ce fait s'interpréter les uns par rapport aux autres.
Pour interpréter un mot, il est toujours important de tenir compte des autres mots du texte.
Fondamental : Lieux communs
Les mots mobilisent enfin des lieux communs, qui sont des formes d'idées reçues attachées à ces mots, établissant une corrélation entre le concept qu'ils véhiculent et un autre concept ou un jugement supposés s'en déduire.
Comme toute idée reçue, ces lieux communs ne sont pas nécessairement vrais. Ils n'en sont pas moins associés aux mots en question de manière implicite au point d'être pris pour acquis, sauf à être explicitement démentis.
Exemple :
Par exemple, le mot cher mobilise un lieu commun selon lequel un objet ou un service cher a un coût qui tend à justifier un blocage de la transaction. Si quelque chose est cher, on s'attend à ce que normalement on ne l'achète pas.
Dès lors dire de quelque chose qu'elle est chère induit implicitement un autre message qui est qu'il vaut mieux ne pas l'acheter.