5.2. La reconstruction d’une économie mondiale intégrée, pacifiée et stable

Le Système Monétaire International (SMI) de Bretton-Woods : l’hégémonie du dollar

Afin d’assurer la future stabilité monétaire – donc économique et politique -, dans le monde occidental (l’URSS se refermant sur elle-même et gardant un rouble inconvertible), le Système Monétaire International (SMI) est mis en place immédiatement après la guerre. Tout commence avec la conférence de Bretton Woods qui s’est tenue en juillet 1944 (du 1 au 22) et qui regroupe 44 Etats autour de plusieurs objectifs : (i) rétablir le multilatéralisme monétaire et commercial ; (ii) assurer la convertibilité des monnaies entre elles ; (iii) rattacher les différentes monnaies de façon stable (parités fixes) à des unités de réserve (or et dollar pour l’essentiel, la Livre Sterling sortant trop affaiblie de la guerre pour rester une monnaie de référence internationale) ; (iv) créer des mécanismes de solidarité entre les Banques centrales et les Etats pour éviter que des crises localisées ne deviennent systémiques comme au début des années 1930. 

Alors que deux projets sont en concurrence, c’est le plan américain préparé par Harry White qui sera finalement adopté[1]. Il présente deux caractéristiques : (i) le Gold Exchange Standard (GES) : « la parité de la monnaie de chaque Etat membre sera exprimée en termes d’or pris comme dénominateur commun ou en dollar des EU de poids et de titre en vigueur au 1er juillet 1944 » ; (ii) une règle générale : « tout Etat membre s’engage à ne permettre sur son territoire que des opérations de change qui respecteront un écart ne dépassant pas 1% de la parité ». Sinon la Banque centrale doit intervenir.

Le GES est donc un système de changes fixes mais ajustables en cas de déficits graves et/ou prolongés. Au lendemain de la guerre, les EU ont un stock d’or considérable. En 1947, le secrétaire d’Etat au Trésor américain, Snyder, peut ainsi informer le FMI que les EU vendront l’or contre tous les dollars qui leur seront présentés. Les autres pays, faute de réserves suffisantes en or, doivent utiliser leurs réserves en dollars pour obtenir de l’or à taux fixe (35 dollars l’once) sans limitation. On a donc une convertibilité à deux paliers, avec passage de chaque monnaie au dollar et à partir du dollar, passage à l’or. Le dollar – as good as gold -, devient un sas vers l’or. 

Le système repose en outre sur deux institutions internationales :  le FMI a pour mission la stabilisation des changes : il gère un stock de devises et d’or fournis par les Etats membres et que ceux-ci peuvent mobiliser (droits de tirages) en cas de crise monétaire. Des fonds sont alors avancés pour éviter la spéculation, l’affaiblissement des réserves, la fuite des capitaux. En échange, sont pris des engagements d’assainissement budgétaire, financier et commercial ; une banque pour la reconstruction et le développement avec une mission de court terme de financement du commerce extérieur et une mission de long terme de financement de la reconstruction : ce sera la BIRD puis la Banque Mondiale.



[1] Un plan britannique assez différent élaboré par Keynes depuis 1941 était en concurrence avec le plan américain. Il était basé sur : (i) l’Union de Compensation – clearing union -, qui constitue un système bancaire ouvert qui s’interpose entre les Banques centrales des différents Etats membres pour le règlement mutuel des soldes de leurs balances des paiements ; (ii) une nouvelle monnaie internationale – le Bancor dont la valeur est définie par rapport à l’or et par rapport à laquelle la valeur de chaque monnaie nationale est fixée – dans laquelle les comptes des BC sont libellés et les compensations sont effectuées. Le crédit d’un pays en Bancor augmente s’il enregistre un excédent commercial, les emprunts de Bancor aux pays excédentaires sont possibles pour les pays déficitaires ou bien la vente d’or contre Bancor à l’Union.