2.2. Les facteurs de progression de la demande : le rôle du commerce extérieur et de la consommation intérieure

La consommation intérieure

Un fait est solidement établi grâce aux travaux de Wrigley et Schofield (1981) : la population anglaise, après avoir pratiquement stagné depuis le milieu du 17ième siècle, progresse à un rythme soutenu à partir de 1740 (entre 1740 et 1760, elle croit à un taux annuel moyen voisin de 0,5%). La population de la Grande-Bretagne passe de 7,4 millions d’habitants en 1750 à 10,7 millions en 1800 et 20,6 millions en 1850. La poussée démographique pourrait être à l’origine de la hausse de la demande textile. Mais l’influence dynamisante de la croissance démographique est contestée : dans une perspective malthusienne, toutes choses égales par ailleurs, elle vient buter sur une insuffisance des subsistances et provoque une hausse des prix et une baisse des salaires réels qui la ramène à son niveau initial (à travers les conséquences de la malnutrition). 

Le développement des villes (surtout Londres) et du commerce s’accompagne d’une transformation du mode de vie et des habitudes de consommation. L’anthropologie historique a montré qu’au 18ième siècle un désir de consommation s’est développé notamment dans la classe moyenne/inférieure. Pour acquérir des objets (tissus à la mode (indiennes), rubans, bijoux…) il a fallu, à productivité constante du capital, travailler plus pour accroître son revenu et assouvir ce désir. Pour P. Verley (L’échelle du monde, (1997)) l’une des clefs de la mutation industrielle est probablement la « marchandisation » et la monétisation d’un travail féminin (lavage, entretien des vêtements…).