1.2. Le capitalisme marchand (1) - Le contexte de la Renaissance

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Cours: Histoire des faits économiques
Livre: 1.2. Le capitalisme marchand (1) - Le contexte de la Renaissance
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Date: lundi 29 avril 2024, 16:29

Introduction

La période de la Renaissance est marquée par une évolution multiple qui marque la rupture avec le Moyen-Age : politique, avec l’affirmation du pouvoir central ; religieuse, avec le protestantisme ; intellectuelle, avec l’invention de la méthode scientifique ; et économique, avec le développement du capitalisme marchand.

Ne perdons pas de vue toutefois que l’économie est encore essentiellement agraire. La dynamique économique est très dépendante des aléas qui touchent l’agriculture, et qui se diffusent au reste de l’économie : en cas de mauvaise récolte, la demande rurale diminue et provoque une baisse de la production manufacturière et des salaires. En outre, le prix des denrées augmente (diminution de l’offre) : le salaire réel (=rapport du salaire et des prix, mesure du pouvoir d’achat) diminue.


La méthode scientifique et le progrès technique

Une évolution intellectuelle importante opère avec la formulation de la méthode scientifique.

La méthode de connaissance de la vérité, héritée du Moyen-Age, est à l’époque essentiellement basée sur l’interprétation des Ecritures et des philosophes antiques. Au XVII°s., c’est toute une génération de savants, comme Descartes et Galilée, qui bâtissent une nouvelle méthode, appelée expérimentale. La connaissance du monde doit se faire par l’observation du monde, la raison, et utiliser le calcul mathématique, selon la séquence : observation à hypothèses à expérimentation.

Ce nouvel esprit scientifique rentre souvent en contradiction avec la Religion, comme le montre l’exemple de Galilée, condamné par un tribunal ecclésiastique pour avoir soutenu que la Terre n’était pas au centre du monde mais tournait autour du soleil. C’est le début du « désenchantement du monde » ou « sécularisation » ; l’ère de la Raison succède à l’ère de la Foi, dans un mouvement très lent qui n’aboutira complètement qu’au XX°s.

La diffusion des progrès scientifiques, permise par l’imprimerie réinventée par Gutenberg au XV°s., et l’encouragement des sciences par les Princes (création des académies : Royal Society en 1662, Académie des Sciences en 1666 (Colbert)) seront l’amorce des progrès techniques et technologiques à la base des Révolutions Industrielles du XVIII°s. et du XIX°s.

« Si j’ai pu voir un peu au-delà, c’est que j’étais porté par des épaules de géants. » (Isaac Newton (1643-1727), à propos de la théorie de la gravitation universelle)

La Réforme religieuse et « l’esprit du capitalisme »

La Réforme est une réinterprétation de la religion catholique, qui commence au début du XVI°s. avec Martin Luther (les 95 thèses en 1517) et Jean Calvin (L’institution de la religion chrétienne, 1536). Elle va favoriser les mentalités en faveur de l’esprit d’entreprise et de l’enrichissement individuel, ouvrant la voie au capitalisme. C’est la thèse de Max Weber dans Ethique Protestante et Esprit du Capitalisme, paru en 1904.

Pour les protestants, le salut de l’homme ne dépend pas des actions menées sur terre : il est fixé une fois pour toutes, dès la naissance. C’est le concept de prédestination, avancé par Jean Calvin. A cela, deux conséquences :

-        L’enrichissement personnel est vu comme une « preuve » de la bénédiction divine. Il n’est donc pas condamnable, comme dans la religion catholique. Au contraire, le protestant doit répondre à la faveur divine en menant une vie de labeur.

-        En revanche, l’individu ne doit pas se complaire dans la jouissance de ses richesses. Il doit mener une vie austère, consacrée au travail et à l’épargne.

On voit, dans cette nouvelle éthique, deux éléments importants : d’abord, la valorisation de l’enrichissement et du travail, ce que nous nommons aujourd’hui « l’esprit d’entreprise ». Ensuite, l’encouragement à l’épargne, qui permet de dégager des capitaux pour l’investissement. C’est là que réside, selon Weber, « l’esprit du capitalisme ».

Les Grandes Découvertes

Le XVI°s. est aussi celui des Grandes Découvertes. La découverte de l’Amérique par Christophe Colomb, en 1492, et celle de la voie maritime vers l’Asie par Vasco de Gama, en 1498, ouvrent des perspectives commerciales importantes. Elles vont modifier le rapport des Européens au monde, en « l’élargissant ». Elles vont aussi favoriser une réorientation du commerce de la Méditerranée vers l’Atlantique, donnant un avantage économique décisif à certains pays européens qui s’affirment comme les puissances de l’époque : Espagne, Portugal, Pays-Bas, Angleterre et France.

Dès le début du XVI°s., les échanges se multiplient avec l’Amérique et l’Asie. A l’Ouest : les nouveaux produits découverts en Amérique, comme la pomme de terre ou le cacao, et surtout les métaux précieux qui s’y trouvent en abondance. A l’Est : les richesses de l’Orient : épices, étoffes, bois précieux…

C’est une évolution de très long terme qui se dessine, avec deux phases principales :

-        D’abord, une économie de « cueillette », où les Européens se contentent d’exploiter les ressources des nouveaux territoires. Mais le problème de la main-d’œuvre se pose rapidement : les indigènes sont décimés par la guerre, la maladie et les conditions de travail très dures. L’interdiction de les réduire en esclavage par le pape Paul III et l’Empereur Charles Quint (également Roi d’Espagne), au milieu du XVI°s., et une émigration insuffisante depuis les pays européens inciteront les colonisateurs à se tourner vers la réserve de main-d’œuvre des pays africains.

-        Ensuite, une économie « de plantation », basée sur l’exploitation foncière des terres prises aux Indiens. On y cultive les produits de consommation absents du sol européen, comme le café, le cacao, le sucre, ou le tabac, ainsi que des matières premières pour alimenter l’industrie naissante, au premier rang desquelles le coton.

Ces aspects portant sur la colonisation européenne seront plus particulièrement développés dans la 4° section.