2.6 : Au-delà du PIB - Comment améliorer la mesure du bien-être ?

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Cours: Macroéconomie 1 : La production et la répartition des richesses dans une économie
Livre: 2.6 : Au-delà du PIB - Comment améliorer la mesure du bien-être ?
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Date: jeudi 26 décembre 2024, 17:56

1. Introduction

Nous avons fini la section précédente en expliquant que le but de l’économie ne devrait pas être de maximiser l’activité économique mais le « développement économique » ou le « bien-être » des populations. Or, le PIB est un indicateur d’activité et non de bien-être. Une question peut alors sembler naturelle : peut-on construire un indicateur de « bien-être » ?

A dire vrai, une telle réflexion sur la construction d’indicateurs qui pallieraient les défauts du PIB n’est pas récente. Dès 1973, James Tobin (1918-2002 et « prix Nobel » en 1981) et William D. Nordhaus (né en 1941 et « prix Nobel » en 2018) proposent dans un article intitulé « Is Growth Obsolete ? » de construire un indicateur plus proche du « bien-être économique ». Depuis cette date, de nombreux indicateurs alternatifs ont été construits.

Il existe donc de nombreux indicateurs qui vont au-delà du PIB. S’il ne s’agit pas de les lister, on peut toutefois présenter rapidement les plus connus d’entre eux.


2. l'IDH

L’IDH ou indice de développement humain est un indice développé en 1980 par Amartya Sen (né en 1933 et « prix Nobel » en 1998) et Mahbub ul Haq (1934-1998) et qui prend en compte trois dimensions : l’espérance de vie, l’éducation et le revenu. L’IDH est un indice qui varie entre 0 et 1 et augmente avec le développement humain.

L’IDH est calculé en deux étapes. Dans la première étape, on va d’abord calculer un indice dimensionnel pour trois composantes – l’espérance de vie, l’éducation et la richesse – puis, ces trois composantes vont être agrégées dans la seconde étape.

Pour calculer chacune des composantes, on procède comme suit :

  • Pour l’espérance de vie : \( I_1 = \frac{EspéranceDeVie - 20}{83.6-20} \)

On considère donc l’espérance de vie à la naissance dans un pays moins l’espérance de vie minimale (20 ans) divisée par l’espérance de vie dans le pays où celle-ci est la plus élevée (le Japon, 83.6 ans [1]), elle-même diminuée de la valeur minimale. Le résultat est un nombre entre 0 et 1 et qui augmente avec l’espérance de vie à la naissance au sein d'un pays.


  • Pour l’éducation, on procède de la même façon que pour l’espérance de vie, mais en prenant en compte deux aspects : le nombre moyen d’années d’étude effectuées dans ce pays et la durée attendue de scolarisation d’un enfant de deux ans. On a :

\( I_2A = \frac{AnnéeD'étudeMoyenne- 0}{13.3-0} \)

\( I_2B = \frac{AnnéeD'étudeAttendue- 0}{18-0} \)

\( I_2 = \frac{\sqrt{I_2A I_2B} - 0}{0.971-0}  \)

Dans ces formules, 13.3, 18 et 0.971 sont les valeurs maximums observées parmi les pays sur ces dimensions spécifiques. Par exemple, le 13.3 est le nombre d’année d’étude moyen dans le pays (les Etats-Unis) où le nombre d’années d’études moyen est le plus élevé au monde. Encore une fois, le résultat de ce calcul est un nombre compris entre 0 et 1 et qui augmente dans les pays où les populations reçoivent de plus longues éducations.

 

  • Pour le revenu, on procède de la même façon en considérant le revenu dans un pays, diminué d’une valeur minimale et en divisant le tout par la plus haute valeur observée. Pour être plus précis, on va considérer le logarithme naturel du revenu national brut par habitant. On a alors :

\( I_3 = \frac{ln(RevenuNationalBrutParHab)-ln(100)}{ln(87478)-ln(100)}  \)

 

Une fois ces valeurs calculées, elles sont ensuite agrégées en utilisant la formule suivante :

\(IDH = I_1^{1/3} I_2^{1/3} I_3^{1/3} \)

On remarque que cette formule s’appuie sur une moyenne géométrique. L’intérêt de procéder ainsi (plutôt qu’avec une moyenne arithmétique habituelle) est d’empêcher un pays « mauvais » sur une des dimensions de la compenser avec de fortes valeurs dans les autres dimensions.



[1] Ce nombre, comme les autres dénominateurs des composantes de l’IDH, sert à normaliser l’indicateur pour qu’il soit toujours inférieur (ou égal) à 1. Ces nombres peuvent évoluer – souvent très faiblement – chaque année puisqu’il s’agit simplement des valeurs maximums observées dans l’ensemble des pays du globe.





3. D'autres indicateurs


Pour conclure ce chapitre, on peut réfléchir à d'autres dimensions à intégrer dans le "bien-être" et donc, diverses corrections à faire dans les indicateurs présentés jusqu'ici:


L’IDH et inégalités

On peut remarquer dans les formules précédentes que l’IDH ne prend pas en compte les inégalités : chaque dimension repose sur la valeur moyenne observée au sein d’un pays. Lorsque l’on s’intéresse aux inégalités au sein de pays, cela peut être problématique. Aussi, existe-t-il des manières de prendre en compte les inégalités dans le calcul de l’IDH. Il est notamment possible de prendre en compte les inégalités par groupes de revenu (IDHI) ou par genre (IDG).

 

Un PIB vert ?

Pour terminer, nous avons évoqué plus haut une des limitations du PIB : le fait qu’il ne prenne pas en compte les dommages environnementaux dans son calcul. Il existe de nombreuses propositions qui prennent en compte l’environnement dans le calcul du PIB afin d'aboutir à un « PIB vert ». Généralement, celui-ci est obtenu en diminuant le PIB de la valeur des dommages environnementaux et en l’augmentant de la valeur des ressources renouvelables produites par une économie. Toutefois, il est extrêmement difficile d’estimer la valeur de ces derniers éléments. C’est pourquoi, malgré l’importance des enjeux environnementaux, il n’existe aucun « PIB vert » faisant consensus parmi les économistes.

 

Ce chapitre a largement développé la notion de PIB, son histoire et ses modes de calculs, son utilisation et ses limites. Maintenant que cet outil central a été défini, nous allons dans les chapitres suivants présenter plus en détail la « théorie de la croissance » et la « théorie des fluctuations » qui utilisent le PIB et étudient ses évolutions à court et à long terme.