2.3 : Comment comprendre et utiliser le PIB ?
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Cours: | Macroéconomie 1 : La production et la répartition des richesses dans une économie |
Livre: | 2.3 : Comment comprendre et utiliser le PIB ? |
Imprimé par: | Visiteur anonyme |
Date: | vendredi 27 décembre 2024, 03:03 |
1. Une réponse rapide
Nous avons de fait déjà en grande partie répondu à cette question lorsque nous avons expliqué l’histoire du PIB : le PIB est avant tout utilisé afin de décrire l’activité économique et son évolution. Lorsque l’on veut savoir comment un choc affecte l’économie dans son ensemble, il faut disposer d’un indicateur synthétique qui mesure l’activité économique.
2. PIB réel et PIB nominal
Le paragraphe précédent souligne un point important et dévoile une difficulté dont nous n’avons pas encore parlé : plus que le PIB en lui-même, c’est souvent son évolution qui intéresse les économistes, les politiciens et le grand public : le fameux « taux de croissance » du PIB. Prenons un exemple pour mieux saisir : la Banque Mondiale calcule qu’en 2018, le PIB de la France était de 2 778 milliards de dollars. En soi, que signifie cette information ? Que la somme des valeurs ajoutées (plus et moins impôts et subventions) atteignait ce montant, ce qui peut sembler peu parlant. En revanche, ajouter à cela que la Banque Mondiale estimait le PIB a 2 586 milliards en 2017 permet de voir que l’activité économique était (légèrement) plus soutenue en 2018 qu’en 2017.
Le fait que l’on s’intéresse davantage à l’évolution du PIB qu’à son niveau directement pose toutefois question. Imaginons pour simplifier qu’une économie soit constituée de deux entreprises : la première fait pousser des fruits qui sont mangés par les citoyens de ce pays et aussi utilisés par la seconde entreprise qui fabrique des gâteaux.
Entreprise 1 : Fruits |
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Emploi |
Ressource |
Consommation intermédiaire : 0€
Valeur ajoutée : 20 000€ |
Production : 20 000€ |
Entreprise 2 : Gâteaux |
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Emploi |
Ressource |
Consommation intermédiaire : 10 000€
Valeur ajoutée : 20 000€ |
Production : 30 000€ |
On imagine qu’il n’y a ni impôts ni subventions. Aussi, les comptes précédents établissent un PIB pour une valeur de 40 000€ (la somme des valeurs ajoutées).
Supposons maintenant que l’on s’intéresse toujours au PIB de ce pays, mais l’année suivante. Par ailleurs, on va supposer que les entreprises produisent exactement la même chose. Notre économie imaginaire a donc produit autant de fruits et de gâteaux que l’année précédente. Supposons toutefois que les entreprises considérées décident de doubler le prix de vente de leurs produits. On obtient alors :
Entreprise 1 : Fruits |
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Emploi |
Ressource |
Consommation intermédiaire : 0€
Valeur ajoutée : 40 000€ |
Production : 40 000€ |
Entreprise 2 : Gâteaux |
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Emploi |
Ressource |
Consommation intermédiaire : 20 000€
Valeur ajoutée : 40 000€ |
Production : 60 000€ |
Et donc un PIB de 80 000€. Est-il raisonnable de penser que l’activité économique a doublé entre les deux années ? Après tout, le PIB lui a doublé… Cela semble toutefois étrange puisque nous avons construit cet exemple en faisant l’hypothèse d’une activité économique strictement identique.
Le problème précédent explique pourquoi les économistes font la distinction entre le PIB nominal (aussi appelé PIB en euros courants) et le PIB réel (aussi appelé PIB en euros constants).
Jusqu’à présent, lorsque l’on parlait de PIB, on parlait en fait de PIB nominal, c’est-à-dire qui utilise les prix de l’année en cours. S’il est souvent nécessaire de commencer par calculer ce PIB nominal avant de calculer le PIB réel, l’exemple précédent montre les difficultés associées à cette notion de PIB nominal. Si les prix varient entre deux années – et en pratique, c’est toujours le cas – on ne peut utiliser le PIB nominal afin d'étudier l'évolution de l'activité économique : on ne saurait dire si une évolution du PIB découle d’un changement du niveau d’activité économique ou d’une variation des prix.
Heureusement, on peut facilement corriger ce problème en employant le PIB réel. Il s’agit en fait de calculer le PIB d’une année (mettons 2015) en utilisant les prix d’une autre année (mettons 2011). En procédant ainsi, on peut facilement comparer le niveau d’activité économique dans le temps puisque les prix sont tous exprimés en utilisant une année de référence (mettons 2011). Pour ce faire toutefois, on ne va pas recalculer la valeur de chaque production et chaque valeur ajoutée avec d’autres prix, on va simplement faire une correction au niveau agrégé.
Imaginons qu’un ou plusieurs organismes [1] construisent un indice des prix et suive son évolution dans le temps. On peut penser cet indice des prix comme un « prix moyen » dans l’économie considérée, mais en pratique, ce qui va surtout nous intéresser c’est l’évolution de cet indice des prix et non sa valeur directement. En fait, les économistes vont même considérer une année de référence qui les intéresse, par exemple 2011 et normaliser l’indice des prix à « 100 » durant cette année. Une fois cette normalisation faite, on va calculer l’évolution de l’indice des prix et regarder sa valeur durant une autre année. Mettons qu’on observe qu’il est de « 110 » en 2015. Avec cette nouvelle information, on peut calculer le PIB de 2015 en utilisant les prix de 2011 ; il suffit de faire :
\( PIB^{2015}_{Prix2011} = PIB^{2015}_{Prix2015} \times \frac{100}{110} \)
[Remarque sur l'indice des prix. Une façon simple de comprendre la construction de cet indice est d'imaginer qu'un agent de l'INSEE va dans un supermarché et dépense 100€ en achetant certains produits (une salade, un cahier, des chaussures, etc.). L'année suivante, un autre agent de l'INSEE achète les mêmes produits. Il regarde alors combien cela lui a couté. En procédant ainsi, on peut se fabriquer un premier indice des prix.]
On peut remarquer que la formule précédente revient à écrire :
\( PIB^{2015}_{Prix2011} = \frac{PIB_{nominal}}{1,1} \)
\( PIB^{2015}_{Prix2015} \) est le PIB nominal de 2015 par définition (le PIB d'une année utilisant les prix de cette même année). Le « 1.1 » est le déflateur du PIB. Sa valeur est égale à un plus le taux de croissance de l’indice des prix qui est souvent associé (pour simplifier) au taux d’inflation d’une économie.Le PIB réel ou PIB en euros constants est donc le PIB d’une année définit en utilisant les prix d’une autre année de référence. Plus concrètement, on a :
\( PIB^{AnnéeA}_{PrixAnnéeB} = \frac{PIB_{nominal}^{AnnéeA}}{1 + \pi } \)
Où \( \pi \) est le « taux d’inflation » et "\( 1+\pi \)" le
déflateur du PIB entre l’année A et
l’année B.
[1] En France, l’INSEE se charge notamment de ce travail. On peut aussi penser au U.S. Department of Labor aux Etats-Unis qui construit des indices de prix.
3. Le PIB par habitant
Il
est habituel de normaliser le PIB par le nombre d’habitants dans un
pays. En effet, le PIB par habitant donne une information
sur le revenu national généré par habitant et donc, peut-être, une
information
plus pertinente pour discuter de la productivité de ce pays, du "niveau
de vie moyen" ou de son développement économique. Par exemple, le PIB de
l'Inde était en 2020 de 2 623 milliards de dollars, celui de la France
était de 2 603 milliards dollars (source Banque Mondiale). L'Inde semble
donc "plus riche". Cette information sur le "revenu" généré par ces
deux pays prend un sens différent lorsque l'on sait qu'il y a environ
1,38 milliards d'habitants en Inde et donc que le PIB par habitant
avoisinait les 1 900 dollars, quand il n'y a en France que 67,5 millions
d'habitants et donc que le PIB par habitant était d'environ 38625
dollars.
Attention toutefois, comme évoqué précédemment, le PIB n’est pas une mesure de bien-être. Par exemple, diviser le PIB par le nombre d’habitants permet d’obtenir une moyenne et cette moyenne peut cacher d’importantes inégalités. Il serait curieux d’associer le PIB (ou le PIB par habitant) au « bien être » si une seule personne captait l’ensemble du revenu national en laissant les autres dans une misère extrême.
Graphique 1 : La crise de 1929 et l’évolution du PIB par habitant
Source des données : Maddison Project Database 2018
La discussion précédente permet de mieux comprendre les graphiques présentés dans le chapitre 1. Reprenons celui sur la crise de 1929. Ce graphique permet d’observer l’évolution de l’activité économique par habitant (donc en corrigeant les éventuelles évolutions de la population) et en corrigeant aussi de possibles évolutions des prix, puisque pour chacune des courbes, on utilise comme prix de référence ceux de 2011 aux Etats-Unis. Remarquons que pour ce faire, on a aussi converti l’ensemble des monnaies dans une monnaie de référence (le dollar américain). Il existe plusieurs façons de procéder et on ne rentrera pas ici dans les détails [1] .
[1] Une méthode simple (mais problématique) consiste à simplement utiliser les taux de change entre deux monnaies.
4. Quelques définitions
Définition de
déflateur implicite (par exemple déflateur du PIB) :
De manière générale, un déflateur implicite mesure les
variations de prix dans un domaine de l'économie en divisant la
grandeur en valeur par cette même grandeur en volume.
Les déflateurs implicites sont nommés d'après l'agrégat
utilisé. Les déflateurs du PIB, de la dépense de consommation finale, de la
formation de capital brute, des exportations et des importations mesurent
les variations de prix dans leur domaine respectif de l'économie. Ils sont
utilisés pour corriger les agrégats des effets de l'inflation.
Le déflateur du PIB s'écarte de l'indice des prix à la
consommation, en fonction notamment, de l'évolution des prix des importations,
des exportations et de la FBCF.
Source INSEE : https://www.insee.fr/fr/metadonnees/definition/c1715
Définition prix
constants / prix courants:
Les prix courants sont les prix tels qu'ils sont indiqués à
une période donnée, ils sont dits en valeur nominale. Les prix constants sont
les prix en valeur réelle c'est-à-dire corrigés de la variation des prix par
rapport à une donnée de base ou de référence. On utilise de la même façon les
termes euros constants et euros courants.
Source INSEE : https://www.insee.fr/fr/metadonnees/definition/c1086