Module 3 - Le contexte juridique international
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Cours: | Cours introductif aux REL, droit d'auteur et licences ouvertes |
Livre: | Module 3 - Le contexte juridique international |
Imprimé par: | Visiteur anonyme |
Date: | vendredi 22 novembre 2024, 01:26 |
Table des matières
- 1. Les systèmes juridiques dans le monde
- 2. Deux approches de la protection des œuvres : le droit d’auteur et le copyright
- 3. Le contrat de licence
- 4. Les licences ouvertes
- 5. Les licences ouvertes Creative Commons
- 6. Domaine public et renonciation à des droits
- 7. L’évolution du cadre juridique international
- 8. Crédits
1. Les systèmes juridiques dans le monde
L’utilisation des ressources éducatives libres (REL) s’inscrit dans un cadre juridique qui résulte du rapprochement de deux traditions juridiques distinctes : le droit romano-civiliste (aussi connu sous le nom de droit civiliste) qui trouve son origine dans le droit romain et le droit anglo-saxon ou « common law ».
Crédits : Commons Wikimedia, https://commons.wikimedia.org/wiki/File:LegalSystemsOfTheWorldMap.png
2. Deux approches de la protection des œuvres : le droit d’auteur et le copyright
L’introduction en Europe, vers 1450, de l’imprimerie par Gutenberg, a permis une plus large diffusion des œuvres et la généralisation de l'accès à l'écrit, phénomène que nous vivons aujourd’hui sous une autre forme avec l’avènement du numérique. Le cadre juridique évolue ensuite dans le cadre territorial de chaque pays et l’on peut distinguer deux approches, liées au système juridique, civiliste ou common law.
2.1. La protection des droits de l’auteur d’une œuvre
Le droit d'auteur (branche du droit de la propriété intellectuelle), qui s'applique dans les pays de droit civiliste, protège les auteurs d’œuvres de l’esprit originales, dès leur création, même si elles sont inédites ou inachevées. Aucune formalité d'enregistrement ou fixation matérielle de l’œuvre n'est nécessaire pour bénéficier du droit d'auteur. Il confère à l’auteur des droits moraux (prérogatives de respect de l’auteur, de l’œuvre, et du lien indissoluble entre l’auteur et son œuvre) qui peuvent être perpétuels ou inaliénables, et des droits patrimoniaux (ou d’exploitation) qui ont une durée limitée et peuvent être cédés.
Selon les pays, le droit de la propriété intellectuelle peut aussi reconnaître, au côté du droit d’auteur, des droits « voisins », concernant notamment les artistes-interprètes, les producteurs de phonogrammes, de vidéogrammes, de bases de données.
2.2. La réglementation de la reproduction des œuvres
Le copyright s’applique dans les pays de common law. Il s’attache plus à la protection des droits patrimoniaux qu’à celle du droit moral et nécessitait, à l’origine, la fixation de l’œuvre sur un support ainsi que l’enregistrement auprès d’un organisme agréé. De plus, le droit moral, quand il est reconnu, n’est ni perpétuel, ni incessible.
2.3. La Convention de Berne : harmonisation partielle du droit d’auteur et du copyright
L’adoption de la Convention de Berne par 165 pays en 1886, permet à la fois une harmonisation partielle du droit d’auteur et du copyright, d’une part, et l’extension de la protection des œuvres dans des pays autres que celui où elles ont été créées, d’autre part.
Aujourd’hui, l’agence des Nations Unies chargée de la Propriété Intellectuelle est l’Organisation Mondiale de la PropriétéIntellectuelle (OMPI / WIPO).
De plus, l'Organisation Mondiale du Commerce (OMC/WTO), organisation intergouvernementale créée en 1994 par les accords de Marrakech, « reconnaît sur le plan juridique » au travers de l'Accord sur les aspects des Droits de Propriété Intellectuelle qui touchent au Commerce (ADPIC, en anglais, Agreement on Trade-Related Aspects of Intellectual Property Rights : TRIPS) « l'importance des liens entre la propriété intellectuelle et le commerce, ainsi que la nécessité d'un régime de propriété intellectuelle équilibré. ».
3. Le contrat de licence
Une réponse adaptée aussi bien dans les pays de droit d’auteur que dans les pays de copyright
Avec le développement exponentiel du numérique, et notamment les logiciels libres, il est apparu nécessaire de préciser et de clarifier les règles qui s’appliquent à la protection des auteurs et de leurs œuvres, pour répondre à des problèmes qui n’étaient pas envisagés en 1886, et surmonter les différences d’approche entre tenants du droit d’auteur, partisans du copyright, et adeptes d’un Internet libre et ouvert.
C’est ainsi que sont apparues les licences ouvertes sur les REL, dérivées des licences ouvertes sur les logiciels libres. Ce sont des contrats entre le détenteur des droits sur une œuvre et un utilisateur (le licencié) qui régissent l’utilisation de l’œuvre.
A ce titre, ces licences s’inscrivent, dans les pays de droit romano-civiliste, dans une stricte hiérarchie des normes juridiques : constitution > traité > loi ordinaire > réglementation > contrat, qui impose aux licences de respecter les normes juridiques de niveau supérieur. Ainsi, une clause d’un contrat de licence contraire à la législation sur le droit d’auteur serait nulle et de nul effet. Une clause imposant la renonciation au droit moral de l’auteur serait ainsi frappée de nullité.
Dans les pays de « common law », le contrat entre les parties est un élément parmi d’autres du contexte juridique, avec une hiérarchie des normes bien moins affirmée et une importance accrue de la jurisprudence.
Le contentieux associé aux contrats de licence peut donc être différent dans les deux systèmes juridiques.
4. Les licences ouvertes
Apparues initialement avec les logiciels libres, les licences ouvertes sont une catégorie de contrats de licence qui permettent une large utilisation des ressources éducatives. Selon le type de licences, elles peuvent autoriser différentes actions telles que la consultation, la réutilisation, l’utilisation à d’autres fins, l’adaptation et la redistribution.
Crédits : Isabelle Ramade. C2i. (2013, 25 novembre). Les contrats de licence (Module 8.3),
dans MOOC Internet, les autres et moi, Canal-U.
Bien que d’origine anglo-saxonne et donc marquées par la tradition de common law, les licences ouvertes Creative Commons sont un exemple de licence ouverte qui ambitionne de répondre de façon quasi-universelle à cette problématique.
5. Les licences ouvertes Creative Commons
Parmi les licences ouvertes, les licences Creative Commons sont souvent utilisées pour diffuser des Ressources Éducatives Libres.
5.1. Le contexte général
Selon l’association Creative Commons « nos licences sont conçues pour être utilisées par les auteurs et titulaires de droits dans la limite des lois et règlements en vigueur. » Cela signifie que, en dehors des pays anglo-saxons de Common Law :
- Les contrats de licence, contrats de droit privé, doivent respecter la hiérarchie des normes de droit public qui sont supérieures au contrat de licence : constitution, législation et réglementation sur le droit d’auteur.
- Les clauses des contrats de licence qui sont contraires à ces normes de droit public sont nulles ; il vous appartient de vérifier si c’est le cas dans votre pays.
Exemple de clause non conforme au droit de différents pays
Les contrats de licence Creative Commons ont une clause qui dispose qu’ils sont irrévocables. Cette clause n’est pas conforme au :
- droit des contrats, dans les pays où les engagements perpétuels sont proscrits ;
- droit d’auteur, dans les pays où le droit moral de l’auteur lui permet à tout moment d’exiger le retrait de son œuvre et de mettre fin à sa libre diffusion.
Dans ces pays, la hiérarchie des normes de droit protège efficacement l’auteur contre cette clause. Ce ne serait pas le cas, néanmoins, si la REL venait à être diffusée sur une plate-forme hébergée dans un pays de common law.
5.2. Les clauses qui distinguent les différents types de licences Creative Commons
L’association Creative Commons a créé six types de contrats de licences, reposant sur deux (ou trois) choix que vous pouvez faire en tant qu’auteur :
- Vous autorisez l’utilisation de votre REL à des fins commerciales : OUI / NON (clause NC) ;
- Vous autorisez la modification de votre REL (création d’une œuvre dérivée) : OUI / NON (clause ND) ;
- Dans le cas où vous autorisez la modification de votre REL, vous imposez la diffusion de l’œuvre dérivée dans les mêmes conditions que celles que vous avez retenues pour votre œuvre : OUI (clause SA (parfois appelée copyleft)) / NON.
Remarque
A noter que la clause BY (attribution, reconnaissance de paternité) n’est pas sujette à un choix. C’est une obligation absolue dans les pays de droit d’auteur.
5.3. Tableau récapitulatif des différentes licences ouvertes Creative Commons
Crédits : Traduction et adaptation de Catherine Rhéaume et Guillaume Vachon, d'après une création originale de Foter | https://foter.com/blog/how-to-attribute-creative-commons-photos/ CC-BY-SA
5.4. Exemple de mention de la licence Creative Commons attachée à une œuvre
Cette œuvre est mise à disposition dans le respect de la législation [du pays]1 protégeant le droit d'auteur, selon les termes du contrat de licence Creative Commons Attribution - Pas d'Utilisation Commerciale - Pas de Modification 4.0 International (https://creativecommons.org/licenses/by-nc-nd/4.0/).
En cas de conflit entre la législation [du pays] 1 et les termes de ce contrat de licence, la clause non conforme à la législation [du pays] 1 est réputée non écrite. Si la clause constitue un élément déterminant de l'engagement des parties ou de l'une d'elles, sa nullité emporte celle du contrat de licence tout entier.
1 remplacer par le nom du pays
6. Domaine public et renonciation à des droits
En droit de la propriété intellectuelle, le domaine public désigne l’ensemble des œuvres de l’esprit et des connaissances dont l’usage n’est pas ou n’est plus restreint par la loi.
L'entrée dans le domaine public ne correspond pas à une réalité uniforme dans le monde. Le copyright et le droit d'auteur notamment varient d'un pays à l'autre. Ainsi, au Canada, une œuvre entre dans le domaine public 50 ans après la mort de tous ses auteurs, alors qu'en France cette durée a été étendue à 70 ans après la mort des auteurs.
Dans les pays où s'applique le droit d'auteur, les auteurs et leurs héritiers conservent indéfiniment leur droit moral. Dès lors, les œuvres n'entrent dans le domaine public que lorsque les droits patrimoniaux de chaque auteur sont épuisés, le droit moral ne pouvant faire l'objet d'une renonciation.
A noter que l’outil Creative Commons CC0 n’est pas conforme au droit d’auteur des pays de droit civiliste. A l’inverse, dans les pays de copyright, comme les États-Unis d'Amérique, il est possible pour l'auteur de renoncer totalement à ses droits, y compris le droit moral de paternité, et d’utiliser l’outil Creative Commons CC0.
7. L’évolution du cadre juridique international
Dans le cadre d’organisations continentales ou régionales, plusieurs États membres des Nations Unies se sont associés pour uniformiser le droit de la propriété intellectuelle et artistique.
C’est le cas de l’Union Européenne, au travers d’un ensemble de directives et de règlements sur le droit d’auteur et les droits voisins.
C’est aussi le cas, en Afrique, avec les accords de Libreville (Gabon) et de Bangui (Centrafrique), qui réunissent dix-sept États au sein de l’Organisation Africaine de la propriété intellectuelle (OAPI).
8. Crédits
Le cadre juridique international, L’Université Numérique, (https://luniversitenumerique.fr/), Cette œuvre est mise à disposition dans le respect de la législation protégeant le droit d'auteur, selon les termes du contrat de licence Creative Commons Attribution – Partage dans les mêmes conditions - 4.0 International (https://creativecommons.org/licenses/by-sa/4.0/deed.fr ).
Auteur :
Jacques Dang, AUNEGe & L’Université Numérique (France)