Section 1 : Origines et conséquences du monopole

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Cours: Microéconomie 2
Livre: Section 1 : Origines et conséquences du monopole
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Date: jeudi 2 mai 2024, 19:46

1. Définition de la situation de monopole

Une entreprise est en situation de monopole lorsqu'elle assure la production d'un bien ou d'un service pour lequel il n’existe pas de substitut proche et doit satisfaire l’ensemble de la demande exprimée sur ce marché

Cette situation implique nécessairement le non-respect de la condition d’atomicité : L’entreprise exerce par ses choix de production une influence décisive sur les conditions du marché.

La situation de monopole résulte aussi le plus souvent du non-respect de la condition de libre entrée/ libre sortie sur le marché, en raison de l’existence de barrières à l’entrée.

Dans une situation de monopole pur, les autres conditions de la concurrence pure et parfaite, notamment les conditions d’homogénéité du produit et de transparence demeurent respectées. Seule cette situation de monopole pur sera considérée dans ce chapitre. 

Vidéo - d'où viennent les monopoles ?

2. Les origines des monopoles

La situation de monopole résulte de l’existence de barrières à l’entrée empêchant l’entrée durable de concurrents sur le marché.  Il faut toutefois distinguer les barrières à l’entrée formelles, d’origine juridique, qui rendent légalement impossible l’entrée de nouveaux concurrents, et les barrières à l’entrée économiques. Dans ce second cas, aucun élément juridique n’empêche l’entrée de nouvelles firmes sur le marché, mais les conditions économiques du secteur ne permettent pas une entrée durablement soutenable pour des concurrents.  Ces deux types de barrières coexistent souvent dans la situation d’un marché.

Ces barrières résultent de 4 situations très différentes :

a)      Le monopole légal résulte de l’existence de barrières législatives ou réglementaires interdisant la production ou la distribution du bien par un autre opérateur. La décision d’octroyer un monopole à un opérateur résulte en général soit de considérations régaliennes, soit de motifs économiques qui relèvent des deux catégories suivantes

b)      Le monopole d’innovation résulte de la commercialisation par une entreprise d’un nouveau produit qu’aucune autre entreprise n’est en mesure de proposer. Selon l’analyse proposée par Joseph Schumpeter, l’obtention d’une rente de monopole constitue la principale motivation des stratégies d’innovation des firmes. A la différence des monopoles légaux ou naturels, les monopoles d’innovation sont toujours de nature temporaire : tôt ou tard, d’autres concurrents imitateurs ou suiveurs entreront sur le marché pour proposer le même produit.

c)       Le contrôle exclusif d’une ressource naturelle ou d’un intrant stratégique peut également être à l’origine d’un monopole dans les secteurs d’exploitation/ transformation de cette ressource.

d)      Le monopole naturel résulte d’une structure des coûts de production qui rend impossible le maintien durable de plusieurs opérateurs sur le marché. La présence d’importantes économies d’échelle rend la production par un seul opérateur moins coûteuse que la production des mêmes volumes par plusieurs firmes.

Une condition suffisante pour l’existence d’un monopole naturel est la présence d’économies d’échelle tout au long de l’intervalle pertinent de la demande agrégée : la fonction de coût moyen de longue période est décroissante pour tous les niveaux de demande agrégée possibles sur le marché (cf. figure 1).

 

Figure 1. La situation de monopole naturel : cas des économies d’échelle sur toute la demande potentielle

 

Une condition suffisante plus générale est l’existence d’une fonction de coût  total C(Q) « sous additive »  telle que :

     

Dans ces conditions, un opérateur unique pourra toujours produire à un coût unitaire plus faible. Cela conduit inévitablement soit à une concentration progressive par fusion-acquisition des entreprises présentes, soit à l’éviction des concurrents de faible taille les moins compétitifs. 

Ces conditions de coût sont typiques des industries de réseaux, caractérisées par l’exploitation d’une infrastructure unique de réseau (ferroviaire, aérien, de distribution d’électricité de gaz, de télécommunications…) génératrice d’une forte proportion de coûts fixes de production.


3. Les conséquences du monopole pour l’entreprise

La principale conséquence de cette situation concerne la fixation du prix sur le marché. Contrairement à la situation de concurrence, l’entreprise n’est plus preneuse de prix (price taker). Elle dispose en monopole d’un pouvoir de marché, qui se traduit par sa capacité à fixer le prix des transactions sur le marché (price maker). 

La courbe de recette moyenne de l’entreprise (demande adressée à l’entreprise, cf. chapitre II section 1), RM(Q), se confond en effet avec la courbe de demande agrégée inversée :

Dans le cas d’une courbe demande linéaire :

La fonction de recette marginale du monopole s’écrit  :

Comme indiqué sur la figure 2, lorsque le monopole augmente son volume de production, sa recette marginale diminue : le monopole reste contraint par la disposition à payer des consommateurs et doit accepter une baisse du prix de vente pour écouler une unité supplémentaire. Pour cette raison, la recette marginale d’un monopole est toujours inférieure à son prix de vente.

Figure 2. Fonctions de recette marginale et moyenne d’un monopole dans le cas d’une demande linéaire

Le pouvoir de marché d’un monopole reste donc limité par les caractéristiques de la demande : il peut fixer le prix sur le marché, mais ne peut vendre que la quantité maximale demandée pour ce niveau de prix par les consommateurs.