Section 1 : La fonction de demande sur le marché

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Cours: Microéconomie 2
Livre: Section 1 : La fonction de demande sur le marché
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Date: samedi 27 avril 2024, 22:37

1. Introduction

La demande d’un bien ou d’un service émane des consommateurs. Ces derniers peuvent bien entendu être des ménages, mais également des entreprises, des administrations publiques, des associations ou encore n’importe quel autre type d’agent économique. Les consommateurs peuvent demander un produit dans un but de consommation finale (satisfaire un besoin individuel ou collectif), de consommation intermédiaire (inclure ce bien dans le processus de fabrication d’un autre bien) ou encore d’investissement (utiliser ce bien pour produire d’autres biens). Quoi qu’il en soit, la demande d’un bien ou d’un service répond à des règles que nous allons maintenant analyser en détail.

2. Définitions et loi de la demande

Qu'est-ce qu'une fonction de demande sur le marché d'un produit ? Qu'est ce qui explique sa forme générale ? Comment la représenter ?

2.1. Forme générale et forme réduite de la demande individuelle


De façon générale, la fonction de demande est la relation entre la quantité d’un bien ou d’un service (d'un produit) demandée par les consommateurs et les différentes variables économiques qui influencent cette quantité. Pour un individu donné, on peut par conséquent formaliser la fonction de demande de la façon suivante :

qD = f (V1, V2, V3, …, Vn)

avec qD la quantité demandée d’un produit par un agent (un individu, un ménage, une entreprise, etc.) et V1, V2, V3, ..., Vn les variables influençant cette quantité. Les variables en question sont particulièrement nombreuses. Intuitivement, on citera bien entendu le prix du bien concerné, mais jouent également le revenu du consommateur, les prix d’un certain nombre d’autres biens ou services pouvant influencer la demande du bien étudié, les goûts et préférences du consommateur, la mode et les tendances du moment, la publicité, la qualité reconnue ou supposée du produit, etc. Ainsi, il apparaît rapidement qu’une infinité de variables peuvent influencer la demande individuelle d’un bien ou d’un service. De plus, ces variables peuvent être différentes selon l’individu observé. Par exemple, un individu peut être beaucoup plus exposé à la publicité qu’un autre et y être, de fait, beaucoup plus sensible ; dans un autre registre, un individu peut être très sensible à l'image de marque des vêtements qu'il souhaite acheter et porter, alors qu'un autre peut n'y attacher aucune importance .

            Pour les besoins de l’analyse microéconomique du marché, nous allons le plus souvent être amenés à exprimer la fonction de demande sous sa forme dite réduite. La nécessaire agrégation des demandes émanant des différents agents en une demande globale sur le marché du bien empêche de considérer simultanément l’ensemble des variables susceptibles d’influencer celle-ci. En effet, la prise en compte de telles fonctions de demande nuirait immanquablement à toute tentative de formalisation des comportements de l’ensemble des consommateurs. Nous allons par conséquent considérer que la demande ne dépend que d’une seule variable, le prix du produit, ce qui revient à supposer que les autres variables sont constantes et données. Le choix du prix du produit comme variable explicative fondamentale de la demande individuelle découle de l’observation la plus élémentaire de la vie économique. La demande dépend toujours du prix. Avant de faire l’acquisition d’un produit, nous commençons systématiquement par prendre connaissance du prix de ce dernier. On écrira par conséquent la forme réduite de la fonction de demande individuelle :

qD = f (p)         avec p le prix d'une unité du produit

Ainsi simplifiée, la fonction de demande montre comment varie la quantité demandée lorsque varie le prix du produit. Elle décrit la relation mathématique s'établissant entre la quantité d'un produit demandée par un agent et son prix.


2.2. Demande individuelle, demande sur le marché et demande à l'entreprise

La demande que nous avons considérée jusqu’ici est la demande individuelle émanant d’un seul et unique consommateur. Afin d’étudier les équilibres de marché il nous faudra, dans la suite de cette section, considérer la demande globale sur le marché. Cette demande globale correspond à la somme ou encore à l’agrégation de l’ensemble des demandes individuelles exprimées pour le produit étudié. Il s'agit de la relation s'établissant entre la quantité demandée d'un produit par l'ensemble des consommateurs et le prix de celui-ci.

Si l’on considère par exemple qu’existent sur un marché trois types de consommateurs exprimant des fonctions individuelles de demande différentes, notées respectivement f1, f2 et f3. Les quantités demandées par un consommateur de chaque type dépendent alors du prix du bien (ou du service) et valent alors respectivement q1 = f1 (p), q2 = f2 (p) et q3 = f3 (p). S’il existe sur le marché n1 consommateurs de type 1, n2 consommateurs de type 2 et n3 consommateurs de type 3, alors la demande globale sur le marché est telle que sur le domaine qu’ont en commun ces trois fonctions et pour un prix donné :

QD = f (p) = n1•q1 + n2•q2 + n3•q3 = n1•f1 (p) + n2•f2 (p) + n3•f3 (p)

avec QD la quantité demandée par l’ensemble des consommateurs présents sur le marché.

On notera que l'agrégation des demandes individuelles en une demande globale n'est pas qu'un exercice strictement théorique. Elle est potentiellement très intéressante en pratique lorsque la demande globale résulte par exemple de la demande de différents groupes démographiques (classes d'âge, genre, CSP, etc.) ou encore de la demande de consommateurs localisés à des endroits différents (demande domestique et demande à l'export par exemple).

Deux phénomènes découlent de ce principe d'agrégation des demandes individuelles : (i) la demande d'un produit s'accroit nécessairement lorsque de nouveaux consommateurs entrent sur le marché de ce produit (et inversement) et (ii) les variables qui influencent simultanément la demande de nombreux consommateurs (la conjoncture économique et sociale par exemple ou encore la publicité) influenceront également la demande globale sur le marché.

La demande à une entreprise est, comme son nom l’indique, celle qui s’adresse pour sa part à une seule entreprise. Elle ne représente donc qu’une partie de la demande totale sur le marché lorsqu’il y a plusieurs entreprises présentes sur ce dernier. Dans le cas d’un monopole, c’est à dire lorsqu’une seule entreprise sert le marché, il y a bien entendu identité entre demande à l’entreprise et demande sur le marché, mais cela n’est vrai que dans ce cas uniquement.

2.3. La loi de la demande

La “loi de la demande” démontre l’existence d’une liaison inverse entre le prix d’un bien et les quantités demandées de ce bien. La microéconomie du consommateur permet en effet d’établir que les fonctions de demande individuelles sont décroissantes : lorsque le prix d'un produit diminue, toutes choses égales par ailleurs, les quantités demandées augmentent (et inversement). C’est un résultat qui est bien évidemment largement intuitif. Cette propriété va donc s’appliquer aussi à la demande totale sur le marché.

Plus précisément, si on prend l'exemple d'une diminution du prix d'un produit, deux effets se combinent :

  1.  les consommateurs tendent à acheter de plus grandes quantités de ce produit, parce que leur pouvoir d'achat s'est accru suite à la baisse de prix du produit (par exemple, si le prix d'une place de cinéma baisse, je pourrai aller plus souvent au cinéma)
  2.  les consommateurs tendent également à réorienter leur consommation vers ce produit devenu relativement moins cher par rapport aux autres produits (par exemple, si le prix d'une place de cinéma baisse, je vais y aller plus souvent au lieu de visionner des VOD à la maison, ou y aller plus souvent plutôt que de jouer aux jeux vidéo).

Donc, à la suite de la diminution du prix d’un produit, un certain nombre de consommateurs accroissent leur demande de ce produit et de nouveaux demandeurs sont attirés par la consommation de ce dernier. La baisse du prix d’un produit entraîne une augmentation de la demande de ce dernier parce que le pouvoir d’achat des consommateurs s’accroît suite à cette baisse – on parle d’effet de revenu – et parce que les consommateurs ont tendance à substituer la consommation du produit devenu moins cher à celle de produits dont le prix n’a pas changé – on parle d’effet de substitution. L'effet total de la diminution du prix sur la demande est ainsi la somme de l'effet de revenu et de l'effet de substitution. Bien entendu, l’inverse se produit suite à une augmentation du prix d’un produit.

Ainsi, QD = f(p) est décroissante, c’est à dire que sa dérivé première f’(p) est nécessairement négative sur l’ensemble du domaine de définition de toute fonction de demande. Cette “loi de la demande” est largement admise en microéconomie, mais il est à noter qu'elle souffre toutefois de quelques exceptions :

  • L'effet Veblen : il existe certain produits et quelques consommateurs pour lesquels la loi de la demande ne s’applique pas. Certains produits très spécifiques sont en effet consommés par des groupes d’individus fortunés et désireux de se distinguer par la consommation – parfois ostensible – de biens ou de services qui ne sont pas accessibles aux autres en raison de leurs prix élevés. On parle alors d’effet Veblen ou plus simplement d'effet de snobisme. Cet effet implique qu’un accroissement du prix de certains produits entraîne un accroissement des quantités demandées de ces derniers. Par exemple, dans le domaine des biens de luxe ou du moins ceux qui permettent une certaine distinction sociale, la baisse de prix de ces produits se traduit par une baisse de l'intérêt qu'ils présentent aux yeux de leurs acheteurs potentiels. A l'inverse, la hausse du prix d'un produit peut le rendre davantage désirable et le faire entrer dans la catégorie des biens dont la possession traduit un rang social élevé. Dans ce cas, les demandeurs ont tendance à vouloir acquérir des produits dont le prix élevé fait toute la valeur, en dépit d'une valeur pratique éventuellement faible. On peut citer à titre d'exemple des produits tels que les services offerts dans certains lieux “select” (locations, restauration, loisirs), mais également des œuvres d'art, des vêtements de créateur, des voitures de luxe, des bouteilles de grand vin, etc. Il est cependant évident qu’un tel comportement n’est en rien dominant.
  • Les effets d'anticipation : on pourrait également considérer que le prix d’un produit augmentant, les quantités demandées de ce dernier augmentent parce que les consommateurs interprètent la hausse de prix comme un signe avant-coureur de futures hausses supplémentaires de ce dernier. Ils effectuent alors des achats dits de précaution, en précipitant ces derniers afin d’éviter les futures hausses supposées du prix (citons ici par exemple les augmentations du prix des carburants ou des prix de l'immobilier). On peut évoquer dans la même veine les achats spéculatifs, qui consistent à acquérir un bien non pas parce qu'il permet de satisfaire un besoin, mais parce qu'on anticipe une augmentation future de son prix. Il y a là un comportement rationnel d’anticipation de la part du consommateur, mais ce problème ferait dépendre la quantité demandée sur le marché du prix futur anticipé du bien, c’est à dire d’une variable différente de celle que nous retenons dans la forme réduite : le prix immédiat, actuel et constaté du bien. La fonction de demande que nous considérons est une fonction instantanée, statique (c’est à dire sans prise en compte du temps passé et futur), et dans ce cadre restreint, il n’y a pas à mettre en doute la liaison négative entre prix et quantités demandées.

2.4. La représentation graphique de la fonction de demande

Nous considérerons de manière générale, par souci de simplification mathématique, que les fonctions de demande sont des fonctions affines, représentables par des droites, bien que cela ne soit pas nécessairement le cas dans la réalité. Considérons, par exemple, la fonction de demande suivante :

On remarquera que la dérivé première de la fonction de demande est négative, ce qui signifie que la fonction considérée vérifie bien entendu la loi de la demande. Cette fonction de demande permet d’établir par exemple que pour un prix fixé à 40 unités monétaires, la demande du produit sur le marché s’élèvera à 50 unités. Elle permet bien entendu également de mesurer le prix pour lequel une quantité donnée sera demandée ; par exemple, la demande de ce produit s'élèvera à 80 si le prix est fixé à 16 unités monétaires.

Par convention, on représente toujours la fonction de demande en portant en abscisses les quantités demandées et en ordonnées les prix pratiqués. Or, dans la forme générale de la fonction de demande QD = f (p), on aurait, par analogie avec y = f (x), les prix en abscisses et les quantités en ordonnées. De fait, la représentation graphique usuelle de la fonction de demande est celle de la fonction de demande inversée qui donne le prix pratiqué en fonction de la quantité demandée. Dans notre exemple, on représente ainsi la fonction :

 

On obtient alors la représentation graphique simple ci-dessous :

Les points d’intersection de la fonction de demande avec les axes ont un sens économique particulier qu’il faut connaître. En abscisse, le point d’intersection avec la fonction de demande indique la quantité qui est demandée lorsque le prix de vente est égal à zéro, c'est-à-dire lorsque le bien ou le service observé est fourni à titre gratuit. La valeur observée, dans notre exemple QD = 100, suggère une certaine saturabilité (un niveau donné de saturation) de la demande. Elle indique que les besoins des consommateurs ne sont pas infinis et que la demande d’un produit connaît un niveau maximum, le niveau de saturabilité de la demande, qui ne saurait être dépassé, quand bien même le produit serait offert gratuitement. En ordonnée, le point d’intersection avec la fonction de demande indique le prix pour lequel la demande est nulle. A ce prix, dans notre exemple p = 80, plus aucun consommateur ne demande le produit. Il s’agit du prix maximum que sont près à accepter les consommateurs pour acquérir une unité du produit considéré.

Si l'on considère par exemple le marché du transport ferroviaire entre deux villes, la demande de billets est d'autant plus élevée que le prix du billet est faible (loi de la demande = effet de revenu + effet de substitution) et il existe un prix maximum à partir duquel plus personne n'achète de billet de train pour ce trajet et un niveau de saturation de la demande qui détermine finalement la demande potentielle maximale sur ce marché (combien de personnes consommeraient ce produit s'il était fourni gratuitement).


3. Les déplacements de la fonction de demande

Comment prendre en considération l'impact sur la demande d'un produit des variables autres que le prix de ce dernier ?

3.1. La prise en compte des effets des variables autres que le prix du bien

En réduisant la fonction de demande au lien s’établissant entre la quantité demandée et le prix du produit, nous avons laissé de coté l’ensemble des nombreuses autres variables pouvant influencer la demande. Ce faisant, on introduit une distinction entre l’effet d’une variation de prix sur la demande, qui se lit sur la courbe de demande et l’effet d’une variation des autres variables sur la demande, qui se traduit par un déplacement de la courbe de demande.

            Ainsi, il est possible de réintroduire dans l’analyse de la demande l’impact des variables autres que le prix du produit. En effet, cet impact pourra se traduire par un déplacement de la courbe de demande, « parallèlement » à elle-même, c'est à dire en considérant "constante" la relation établie entre le prix et la quantité demandée. La variation d’une variable autre que le prix du produit ne modifie en effet en rien la relation fondamentale existant entre la demande et le prix du produit – relation qui se traduit par la pente de la courbe de demande – mais elle modifiera à la hausse ou à la baisse la quantité demandée du produit pour un prix donné.


Dans le graphique ci-dessus, les évolutions d’une variable autre que le prix du produit entraînent des déplacements de la droite de demande, parallèlement à elle-même, vers la droite ou la gauche du graphique (passage de D0 à D1 ou à D2). Selon les cas, elles entraînent donc – pour un prix p* donné – un accroissement de la quantité demandée, par exemple de Q0 à Q1, ou une diminution de celle-ci, par exemple de Q0 à Q2.

Le principe fondant les déplacements de la fonction de demande étant maintenant connu, nous allons revenir sur les principales variables autres que le prix pour discuter de leurs effets sur les déplacements de la fonction de demande.


3.2. Demande d'un produit et revenu des consommateurs

De manière générale, si le revenu des consommateurs s’accroît, on s’attend à ce que la droite de demande se déplace vers la droite du graphique ci-dessous. En effet, si le revenu des consommateurs s’élève, alors on passera de la droite de demande initiale D0 à une droite de demande telle que la droite D1, pour laquelle la quantité demandée s’accroît à prix constant, passant de Q0 à Q1. Les consommateurs, voyant leur pouvoir d’achat s’améliorer, accroissent leur demande du bien concerné, même en l’absence de toute évolution favorable du prix de ce dernier. A l’inverse bien entendu, une baisse du revenu des consommateurs provoque un déplacement vers la gauche de la demande, de D0 à une droite parallèle telle que la droite D2. On assiste dans ce cas à une diminution des quantités demandées à prix constant. Il est donc tout à fait possible d’observer – à travers l’influence de la variable revenu – les effets de la conjoncture économique sur la demande d’un bien. C’est en effet bien souvent cette dernière qui est à l’origine des évolutions globales, à la hausse ou à la baisse, des revenus de l’ensemble des consommateurs d’un bien ou d’un service. Ce type d'évolution d'ordre global peut aussi provenir d'une évolution générale des revenus liée par exemple à une variation à la hausse ou à la baisse du salaire minimum, des taux d'imposition ou encore des montants des transferts sociaux.

Notons toutefois que les effets détaillés plus haut peuvent être entièrement inversés dans le cas très particulier d’un ensemble de biens qualifiés de bien inférieurs. Ces biens voient en effet leur demande diminuer lorsque les revenus des consommateurs s’accroissent et leur demande s’accroître lorsque les revenus diminuent. Un exemple pertinent de ce type de biens réside dans les produits dits « premier prix » des grandes surfaces. Alors qu’une conjoncture favorable incite à substituer à la demande de ces produits une demande de produits considérés comme étant de meilleure qualité, une conjoncture défavorable entraîne un accroissement de la demande de ceux-ci. Les biens inférieurs restent toutefois suffisamment rares pour que la règle de déplacement de la demande en fonction des variations de revenus initialement évoquée puisse être généralisée.

3.3. Les prix des autres biens et services

 demande d’un bien ou d’un service est également susceptible de réagir aux variations de prix d’un autre bien ou service. Les effets de la variation du prix d’un produit sur la fonction de demande d’un autre produit diffèrent selon les relations qu’entretiennent entre eux les produits concernés. Il importe donc de considérer différemment les choses selon que ceux-ci sont substituables, complémentaires ou indépendants.

On dit de deux biens ou services qu’ils sont substituables si la consommation de l’un peut remplacer celle de l’autre aux yeux des consommateurs. En d’autres termes, deux produits sont considérés comme étant substituables s’ils sont susceptibles de satisfaire sensiblement les mêmes besoins des consommateurs. L'utilisation de l'avion ou du train sur un même trajet sont donc des produits substituables, au même titre qu’une VOD (vidéo à la demande) et un ticket de cinéma ou que les pêches et les nectarines. En revanche, deux biens ou services sont qualifiés de complémentaires si la consommation de l’un va de pair avec la consommation de l’autre, c'est-à-dire si la consommation de l’un s’accompagne nécessairement de la consommation de l’autre. L’automobile et l’essence, l’imprimante et ses cartouches ou encore le smartphone et ses applications sont donc des biens complémentaires. Enfin, deux biens sont considérés comme étant indépendants dès lors qu’ils ne sont ni substituables, ni complémentaires.

Lorsque l’on s’intéresse à la demande d’un produit donné ; si l’autre produit dont le prix varie est un produit substituable au précédent, alors une augmentation du prix de ce produit devrait entraîner une augmentation de la quantité demandée du produit que l’on étudie. A contrario, une baisse du prix d’un produit substituable entraînera, toutes choses égales par ailleurs, une baisse de la demande du produit étudié. Par exemple, si l’on s’intéresse à la demande de tickets de cinéma, initialement représentée par la droite D0, alors une baisse du prix des VOD entraînera un déplacement de la fonction de demande de D0 à D2. La quantité demandée de tickets de cinéma diminue alors à prix constant (de Q0 à Q2 pour un prix p*), car les consommateurs ont tendance à substituer à cette dernière une demande de VOD qui, tout en satisfaisant sensiblement le même besoin, sont devenus relativement moins chères que le cinéma. On observerait évidemment l’effet inverse à la suite d’un accroissement du prix des VOD.

Si l’autre produit dont le prix varie est un produit complémentaire du précédent, alors une augmentation du prix de ce produit devrait entraîner une diminution de la quantité demandée du produit que l’on étudie. A l’inverse, la baisse du prix d’un produit complémentaire entraînera, toutes choses égales par ailleurs, une hausse de la demande du produit étudié. Par exemple, si l’on s’intéresse à la demande de cartouches d’imprimante, initialement représentée par la droite D0, alors une baisse du prix des imprimantes entraînera un déplacement de la fonction de demande de D0 à D1. La quantité demandée de cartouches d’imprimante augmente alors à prix constant (de Q0 à Q1 pour un prix p*). La demande d’imprimantes augmentant, du fait de la baisse de leur prix et de la loi de la demande, celle des cartouches s’accroît également dans la mesure où la « consommation » d’imprimantes s’accompagne nécessairement de la consommation de cartouches.

Enfin, on notera que les variations de prix d’un bien indépendant du bien étudié n’ont évidemment aucun impact significatif sur la fonction de demande de ce dernier.

A titre de complément, il peut être utile de signaler que le cas de complémentarité peut se produire de façon indirecte même si les biens sont a priori indépendants. En effet, si le prix d’un bien augmente, le pouvoir d’achat général du consommateur diminue, ce qui réduit alors sa consommation de tous les autres biens. L’importance de cet effet dépend bien sûr du poids dans le budget du consommateur du bien dont le prix augmente. Ainsi, cet impact indirect devrait être imperceptible si c’est par exemple le prix de l’or qui augmente, mais beaucoup plus sensible si c’est le montant des loyers ou le prix de l'énergie qui s’accroît.


3.4. La démographie des acheteurs

Les effets de la démographie des acheteurs constituent un phénomène de longue période, aussi bien quantitatif que qualitatif. D’un point de vue quantitatif, puisque la demande totale résulte de l’agrégation des demandes individuelles, alors la croissance démographique de la population doit, toutes choses égales par ailleurs, augmenter la demande de n’importe quel bien ou service. Parce que la population, sauf circonstances exceptionnelles, augmente régulièrement, alors la fonction de demande de tout produit connaît un déplacement lent mais continu vers la droite, entraînant la demande de quantités de plus en plus élevées au cours du temps, et ce à prix constant. A titre d'exemple, ce phénomène est particulièrement frappant, par exemple, pour la demande de services publics ou d'énergie.

D’un point de vue plus qualitatif, des variables telles que la structure par âge ou par type d’habitat (urbain, rural) de la population peuvent également jouer un rôle important sur la demande de certains produits. Les habitudes de consommation peuvent en effet varier selon les groupes de population identifiés par ces variables. Par exemple, dans un pays dans lequel la population à tendance à vieillir et à s’urbaniser, il apparaît que la demande d’aliments pour bébés ou d’outils de jardinage aura tendance à s’amenuiser, alors même que la demande de produits de santé et de transports en commun aura tendance à s’accroître.


3.5. Les goûts et préférences des consommateurs

Il s’agit ici d’étudier les effets sur la demande d’un ensemble de variables relativement hétéroclites mais qui n'en sont pas moins importantes quant à leurs impacts sur la demande des produits. Les goûts et préférences des consommateurs relèvent l’influence de toutes les autres variables sur la demande. A court terme, ces goûts et préférences peuvent se modifier pour un certain nombre de raisons et entraîner, toujours à prix constant, des variations à la hausse ou à la baisse de la demande d’un bien ou d’un service.

On retrouvera ici tous les effets positifs ou négatifs que peuvent avoir sur la demande d’un produit la publicité, les effets de mode, la saisonnalité, la météo, le « moral » des consommateurs, les phénomènes d’anticipation ou de retardement des achats, les taux d’intérêts des crédits à la consommation, ou toute autre circonstance particulière susceptible d’influencer la demande.