Section 4 : Le monopole sous influence : les autres politiques de prix
1. Introduction : la régulation du comportement des monopoles
Nous avons étudié jusque-là la stratégie économique d'un monopole libre de maximiser son profit. Mais les monopoles sont très souvent conduits à adopter d'autres stratégies en raison de contraintes qui pèsent sur leur situation. Il s'agit donc de comprendre pourquoi, dans beaucoup de cas, les monopoles ne maximisent pas leur profit !
Deux types d'influence sont susceptibles d’affecter les choix d'un monopole et de modifier son comportement : la régulation de l’activité par une autorité publique et la menace d'entrée de nouveaux concurrents
La régulation publique peut prendre deux formes principales : la propriété publique et la régulation des monopoles privés
La propriété publique consiste à confier le monopole d’une activité à une entreprise publique, dont l’Etat ou une autre entité publique possède la majorité du capital ou des droits de vote. Ce faisant l’autorité publique peut imposer directement au monopole des objectifs de production et de prix en accord avec les objectifs de cette autorité.
C’est un mode de gestion des
monopoles naturels particulièrement répandu en Europe à partir des années 1930, avec
la création de grands monopoles publics tels que, en France, Air France (1933, transport aérien), la SNCF (1938, transport ferroviaire) ou EDF (1946, électricité).
La régulation des monopoles privés consiste pour une autorité publique à réglementer l’activité d’une entreprise privée en situation de monopole. Cette régulation peut se faire notamment par une réglementation des prix ou du taux de rendement, dans le cadre par exemple de contrats de concession (exemple des concessions autoroutières) ou de délégation de services publics (gestion de l’alimentation en eau potable des collectivités territoriales).
Trois stratégies de régulation publique seront présentées ici : la tarification au coût marginal (§3), la tarification au coût moyen (§4) ou la réglementation du taux de marge (§5).
La menace d’entrée va conduire un monopole à adopter des stratégies dite de prévention de l’entrée, visant à décourager l’entrée de nouveaux concurrents.
La menace d’entrée dépend des caractéristiques économiques intrinsèques du marché (barrières à l’entrée technologiques, économies d’échelle, degré de différenciation des produits…) mais aussi de l’action des pouvoirs publics cherchant à favoriser un haut niveau de concurrence potentielle (via la menace d’entrée) pour contraindre le monopole à une forme « d’autodiscipline ».
Ce point de vue a reçu une attention considérable au début des années 80 à travers la théorie des marchés contestables proposée par W. Baumol, J.C. Panzar et R. Willig dans leur ouvrage de 1982, « Contestable Markets and the Theory of Industry Structure ». Selon cette approche, sur un marché parfaitement contestable, c’est-à-dire sur lequel de nouveaux concurrents sont parfaitement libres d’entrer et de sortir rapidement et sans coûts irrécupérables, un monopole sera contraint de pratiquer un prix nettement inférieur à celui maximisant son profit, pour décourager les entrants potentiels.
Cette nouvelle approche du monopole a largement contribué à redéfinir les modes de gestion des monopoles et des industries de réseaux à partir des années 90, en favorisant l’ouverture à la concurrence et la déréglementation de ces secteurs comme alternative à la régulation publique (voir aller plus loin : politique de la concurrence ; industries de réseau).
Trois stratégies de prévention de l’entrée
seront présentées ici : la maximisation du chiffre d’affaires (§2), la maximisation de la production sans pertes
(§4) ou la limitation du taux de marge
(§5).
Vidéo - la régulation des monopoles